En 1949, il dut s’expatrier et rejoindre l’île de Taiwan comme l’ont fait de nombreux autres maîtres d’arts martiaux et d’intellectuels et y fonda l’école de Taichi Chuan « Shr Zhong » ‘le juste rythme’.

En 1964, invité aux Etats-Unis au siège de l’O.N.U, il fit une remarquable démonstration de Taichi Chuan devant les membres de l’assemblée. Il fondera suite à cela, à New York, en 1965, le Centre pour la Culture et les Arts « Shr Jung » (l’école de Taichi Chuan) ouvert à tous ceux qui désiraient étudier. Il devint un pionnier du Taichi auprès des occidentaux qui, à cette époque, n’ont guère accès à cette pratique. Son deuxième ouvrage « Chengzi Taichi Chuan Zixiu Xinfa » (la nouvelle méthode d’apprentissage personnel du Taichi Chuan selon maître Cheng) est publié en 1966, fort de son expérience auprès de nombreux élèves, l’ouvrage se présente comme un manuel à la portée de tous permettant un apprentissage aisé de la forme en 37 pas. Au cours de ses dix dernières années, le Professeur Cheng effectua de nombreux voyages avec son épouse en Amérique et en Europe.

Cheng Man Ching reste aux E.U. jusqu’en 1974.

Après la cinquantaine, il s’était laissé pousser la barbe et prit le nom de « Man-jan » ou « L’Homme aux Favoris ». Et comme, même après ces soixante ans, il continuait d’étudier souvent toute la nuit sans fatigue, on lui donna également le nom de « L’Hôte de la Tour du Long Soir » (Le Professeur Cheng adopta ce nom d’écrivain à New York où il vécut dans un appartement d’un immeuble d’où il pouvait voir les gratte-ciel new- yorkais durant les longues soirées). Il s’appela également « Le Vieil Enfant qui ne se lasse jamais d’apprendre ». Un autre de ses noms d’écrivains était « L’Ermite de l’Encrier de Jade ».

En 1974, il retourna à Taiwan pour publier Yi Chuan (Commentaire sur le Livre des Changements) qui comporte plus de 100 000 caractères. Il relut personnellement les épreuves, et déclara à de proches amis, juste après la deuxième relecture : « Si je dois mourir, je n’aurai aucun regret. » .Tout le monde crut à une plaisanterie. Qui aurait pensé qu’à minuit, le 23 mars 1975, on le retrouverait la tête posée sur ses bras sur la table, comme s’il dormait ? Il ne devait jamais plus se réveiller. On l’envoya immédiatement à l’hôpital. À 2h15, le 26 mars, il quitta ce monde. Il était dans sa 75ème année.

Des funérailles nationales eurent lieu pour ce grand homme de Taichi et de peinture. Son enseignement rayonne toujours à Taiwan, en Asie du Sud-est (Malaisie, Singapour…), aux E.U, en Europe et même en Chine Populaire où Cheng Man Ching est reconnu désormais dans l’histoire officielle du Taichi Chuan.

Yien Chia Kan, le président de la République de Chine, écrivit un discours commémoratif pour le Professeur Cheng, « Je n’aurai jamais pensé que le premier discours d’hommage que je dusse écrire fusse pour un vieil ami. »

Ses amis, ses proches et ses disciples disent qu’il avait l’allure d’un gentleman distingué avec un air cultivé qu’il était un homme honnête et intègre, et toujours fidèle à la droite ligne de conduite qu’il s’était fixé. Il n’hésitait ni ne faisait de compromis avec lui-même.

Le Professeur Cheng Man Ching reste dans la mémoire de tous comme le maître aux cinq excellences de par sa maîtrise de la calligraphie, la poésie, la peinture, la médecine et le Taichi Chuan. Il pouvait les unir comme s’il s’agissait de perles enfilées sur fil. Ce fil était le Tao. Parce qu’il avait étudié à fond les classiques et les sages, il avait pénétré les profondeurs des principes de la philosophie.

Ainsi, il y avait une harmonie entre le passé et le présent, les sages antiques et cet homme du monde moderne. Le vénérable Yu You Jen le louait en ces termes : « Il est un don unique de cette époque. Ce que les autres considèrent comme la chose la plus difficile, lui, tout seul, le fait bien et facilement. Ce n’est pas une consécration vaine! Les accomplissements de sa vie entière furent dirigés dans le sens du développement et de l’expansion de la culture chinoise traditionnelle. Ceux-ci étaient les fruits de sa nature éclectique et de son génie pénétrant, et étaient des travaux réellement originaux, pas simplement des compendiums du travail d’autres spécialistes. En vérité, ces écrits résisteront au temps et aux critiques ! »

Quand on l’interrogeait sur ces domaines maître Cheng déclarait que parmi toutes ces disciplines celle qui lui apportait le plus de joie était le Taichi Chuan pour la simple raison qu’on en retirait que des bienfaits sans rencontrer d’inconvénient.

Pour apprendre le Taichi Chuan, il faut investir dans la perte.
Sa pratique développe la vigueur d’un corps, d’un peuple, d’un pays, les responsables politiques pourraient s’en inspirer.

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